Mothers : A Song for Wartime – Le Théâtre Choral de Marta Górnicka
J’ai récemment assisté à la représentation de « Mothers: A Song for Wartime », une œuvre puissante signée par la dramaturge polonaise Marta Górnicka. Ce spectacle choral, présenté en polonais, ukrainien et biélorusse, a résonné profondément en moi, autant par sa force artistique que par sa portée politique et sociale. Au-delà des chants et des cris, ce qui m’a frappé, c’est l’utilisation de textes et d’images pour aborder des réalités dures comme le trauma, l’état de stress post-traumatique (ESPT), et les viols de guerre.
Présenté dans la Cour d’honneur au Festival d’Avignon, Mothers a capté l’attention pour sa portée politique et artistique.
Un théâtre choral révolutionnaire
Marta Górnicka réinvente ici le chœur antique pour raconter l’histoire de vingt-et-une femmes, survivantes de guerres et de persécutions. Ces femmes, réfugiées de diverses origines — ukrainiennes, biélorusses, polonaises — se tiennent debout, unies dans une performance collective qui va au-delà de la simple parole. Leurs chants sont un mélange de murmures, de cris et de silences pesants, soulignant non seulement leur douleur, mais aussi leur résilience.
Le théâtre choral devient, sous la direction de Górnicka, une arme artistique. Les chants, inspirés des berceuses et des poèmes traditionnels, racontent ce que la guerre détruit, ce qu’elle arrache aux femmes et aux familles. Sur un plateau épuré, leur voix collective devient le symbole d’une lutte, mais aussi d’un espoir : celui de survivre à l’inimaginable.
Trauma, ESPT et viols comme armes de guerre
Ce qui ajoute une dimension encore plus poignante à ce spectacle, ce sont les textes projetés tout au long de la performance, qui abordent des sujets comme le trauma, l’état de stress post-traumatique, et les violences sexuelles utilisées comme armes de guerre. Ces mots, écrits en grand sur des écrans, interrompent le chant et confrontent le public à la réalité brute de la guerre.
Le traumatisme et l’ESPT sont des thèmes récurrents qui s’entrelacent avec les récits personnels des femmes sur scène. On comprend alors que ces femmes ne sont pas seulement des réfugiées de guerre, elles sont des survivantes de multiples formes de violence, dont certaines laissent des cicatrices invisibles mais profondes. Leurs corps et leurs esprits portent les marques de cette violence, et le chant collectif devient alors une tentative de guérison, un exutoire face à l’indicible.
« L’ESPT est un phénomène courant chez les survivantes de guerre. Pour en savoir plus sur ses effets, consultez cet article de Psychologie Magazine. »
Parmi les sujets les plus choquants, celui des viols de guerre est mis en lumière comme une arme utilisée contre les femmes pour briser non seulement leur identité, mais aussi les communautés qu’elles représentent. Górnicka ne tourne pas autour du sujet ; elle le confronte de manière frontale, forçant le public à reconnaître que ces violences font partie intégrante de la guerre, même si elles sont souvent ignorées ou minimisées.
« Les violences sexuelles utilisées comme armes de guerre sont bien documentées par des organisations comme Amnesty International. »
Une force collective : L’esprit de résistance
Le chœur de femmes dans Mothers est bien plus qu’un simple groupe de performeuses. Ensemble, elles incarnent la force collective des survivantes. Leur chant, parfois crié, parfois murmuré, porte une intensité émotionnelle qui ne laisse personne indifférent. Chaque voix raconte une histoire de perte, de douleur, mais aussi de résilience. Ce chœur devient alors un rempart contre l’oubli et l’effacement.
Le moment le plus marquant reste la scène où les femmes exécutent un hacka collectif, inspiré des supplications antiques. Ce geste, à la fois terrifiant et émouvant, montre la puissance de leur unité et leur volonté de survivre. Dans cette fusion de corps et de voix, la douleur individuelle devient une force collective capable de résister à l’oppression.
Un spectacle nécessaire
Mothers: A Song for Wartime est plus qu’un simple spectacle ; c’est une œuvre militante et cathartique qui met en lumière des sujets trop souvent ignorés. La guerre, dans toute sa violence, laisse des traces non seulement sur les champs de bataille, mais aussi dans les corps et les esprits des femmes. Le spectacle de Marta Górnicka est un plaidoyer pour que ces voix ne soient pas oubliées, pour que ces souffrances ne soient plus ignorées.
En ces temps où les conflits armés continuent de ravager des vies, Mothers est un cri politique, une invitation à réfléchir à ce que la guerre brise et à la manière dont nous pouvons, collectivement, soutenir celles qui luttent pour se reconstruire.
Si tu as l’opportunité de voir ce spectacle, je te recommande vivement d’y assister. Non seulement pour sa beauté artistique, mais aussi pour son message universel et profondément humain. Marta Górnicka a créé une œuvre essentielle qui fait écho à l’actualité tout en honorant la mémoire des femmes qui se battent contre l’injustice et la violence.