Détresse émotionnelle : Comment soutenir un proche ?
Avez-vous déjà été démunie face à la souffrance d’un proche ? Vous êtes-vous déjà demandé quoi dire pour vraiment aider sans aggraver la situation ? Nous avons toutes été là, cherchant les mots justes pour apporter notre soutien. Dans cet article « Comment aider un proche en souffrance : conseils et stratégies efficaces », nous allons découvrir comment nos propres mécanismes d’adaptation (aussi appelés mécanismes de défense), comme la rationalisation ou l’évitement, nous empêchent de bien écouter. Nous découvrirons également comment les surmonter pour apporter un soutien bienveillant.
Comprendre les mécanismes d’adaptation
Les mécanismes d’adaptation sont des stratégies psychologiques que nous utilisons pour faire face à des situations stressantes ou émotionnellement difficiles. Leur fonction principale est de protéger notre bien-être mental en réduisant la détresse émotionnelle. Cependant, ces mécanismes interférent parfois avec notre capacité à écouter et à soutenir efficacement un proche en souffrance.
L’empathie, souvent mal comprise, ne consiste pas à se mettre à la place de l’autre. Comme le disait Freud : « L’empathie c’est la capacité à se mettre à la place de l’autre par procuration ». En d’autres termes c’est la capacité de comprendre la situation vécue par l’autre sans prétendre vivre ou avoir vécu exactement la même expérience. Nous nous « contentons » de reconnaître et valider les émotions et les perspectives de l’autre sans les minimiser ni les juger. C’est dans ces conditions que nous pourrons apporter un véritable soutien.
L’idée est de maintenir une distance tenable, ce qui signifie que nous devons éviter de nous mettre en difficulté nous-mêmes. Il convient de trouver un équilibre entre offrir un soutien sincère et préserver notre propre bien-être émotionnel. Il ne faut pas confondre apporter son soutien et « syndrome de l’infirmière ».
La rationalisation
La rationalisation consiste à donner des raisons logiques pour justifier une situation difficile, même si ces justifications ne sont pas entièrement vraies ou adéquates. En cherchant à rationaliser, on minimise la souffrance de l’autre, lui donnant ainsi l’impression que ses émotions sont injustifiées.
Par exemple, dire « Ça pourrait être pire, tu devrais être heureux d’avoir un travail » semble aidant, mais cet énoncé invalide les sentiments du proche. La première chose à faire est donc de valider (au sens reconnaitre) ses émotions avant de proposer des perspectives rationnelles. Par exemple, « Je comprends que tu traverses une période difficile, c’est normal de se sentir comme ça. »
La banalisation
La banalisation consiste à diminuer l’importance de la souffrance de l’autre. L’autre ressent sa douleur comme non légitime ou non digne d’attention.
Par exemple, dire « Tout le monde passe par là, ce n’est pas si grave » est perçu comme une tentative de minimiser la situation. Une approche plus efficace est de reconnaître la gravité de la situation et d’offrir un soutien sincère, comme « Je vois que cela te pèse beaucoup, et c’est tout à fait normal de te sentir ainsi. »
L’ évitement
L’évitement consiste à ignorer ou fuir les discussions sur la souffrance. En évitant ces conversations, on risque de laisser le proche se sentir isolé et incompris.
Par exemple, changer de sujet ou éviter les discussions profondes ne fait qu’aggraver la situation. Il est important d’être présent et disponible, même si la conversation est difficile. Dire quelque chose comme « Je suis là pour t’écouter, même si c’est difficile d’en parler » offre un grand soutien.
La fuite
La fuite est la recherche de distractions pour éviter de faire face à la souffrance. Cette approche empêche de traiter les problèmes réels et retarde le soutien nécessaire.
Par exemple, proposer des activités superficielles pour éviter de parler des vrais problèmes semble utile à court terme, mais ne résout rien à long terme. Une meilleure approche est de combiner des moments de détente avec des discussions ouvertes et honnêtes, par exemple « Allons prendre un café et si tu veux, on pourra parler de ce qui te préoccupe. »
La sublimation
La sublimation consiste à transformer la souffrance en quelque chose de positif ou créatif. Bien que cela puisse être bénéfique, il est important de ne pas passer trop rapidement à des solutions sans reconnaître pleinement la douleur. Encourager à se lancer dans des projets créatifs pour oublier la souffrance est intéressant, mais doit être accompagné d’une écoute empathique.
Dire « Je pense que dessiner pourrait t’aider, mais je suis aussi là pour écouter ce que tu ressens » combine les deux approches.
Le déni
Le déni est le refus de reconnaître la réalité d’une situation stressante. En ignorant la souffrance du proche, on majore son sentiment de solitude.
Par exemple, dire « Non, ça ne peut pas être si grave que ça » est nuisible. Accepter la réalité de la situation et offrir un soutien actif, par exemple « Je vois que c’est difficile pour toi, je suis là pour t’aider à traverser ça, » est essentiel.
La projection
La projection attribue ses propres sentiments ou pensées à quelqu’un d’autre. Cela conduit à mal interpréter les besoins du proche.
Dire « Tu te sens ainsi parce que tu es trop sensible » est une projection. Il est plus utile d’écouter sans juger et de valider les émotions du proche, par exemple « Comment te sens-tu vraiment par rapport à cette situation ? »
Régression
La régression est le retour à un comportement plus immature face au stress. Cela amène à ne pas aborder la situation avec la maturité nécessaire.
Dire « Tu fais toujours des histoires pour rien » est une régression. Aborder la situation avec sérieux et empathie, par exemple « Je comprends que tu te sens bouleversé, parlons-en calmement, » est plus bénéfique.
Le déplacement
Le déplacement consiste à transférer ses émotions sur une cible moins menaçante. Cela détourne l’attention des vrais problèmes et blesse involontairement le proche.
Par exemple, dire « Je suis énervé parce que tu es toujours en train de te plaindre » est un déplacement. Reconnaître ses propres émotions et les séparer des besoins du proche, par exemple « Je suis frustré, mais je veux comprendre ce que tu ressens, » est une meilleure approche.
La formation réactionnelle
La formation réactionnelle consiste à adopter des attitudes ou des comportements opposés à ses véritables sentiments. Cela crée de la confusion et de l’incompréhension.
Par exemple, dire « Je suis sûr que tu vas surmonter ça facilement » peut sembler rassurant, mais peut aussi nier la difficulté de la situation. Être honnête et offrir un soutien authentique, par exemple « Je sais que c’est difficile, mais je crois en toi, » est plus utile.
L’intellectualisation
L’intellectualisation utilise la pensée logique et l’analyse pour éviter des émotions stressantes. Cela paraît distant et non empathique.
Par exemple, dire « Statistiquement, la plupart des gens passent par là » est une intellectualisation. Mélanger des faits avec de l’empathie pour montrer compréhension, par exemple « Je comprends que cela te semble difficile maintenant, mais sache que c’est une situation commune et nous pouvons la surmonter ensemble, » est plus équilibré.
L’isolation
L‘isolation consiste à séparer l’émotion de la pensée ou de l’événement. Cela conduirt à ne pas aborder la souffrance émotionnelle du proche.
Dire « C’est juste un événement, ça va passer » isole l’émotion. Reconnaître les émotions et en discuter ouvertement, par exemple « C’est normal de se sentir triste après ce qui s’est passé, parlons-en, » est plus approprié.
Ce « qu’il faut dire » et « ne pas dire »
Lorsqu’un proche est en souffrance, les mots et les actions que nous choisissons ont un impact.
Voici un guide détaillé pour savoir quoi dire et quoi éviter pour offrir le meilleur soutien possible.
Ce « qu’il faut dire »
- « Je suis là pour toi. »
- Pourquoi c’est important : Cette phrase simple assure la personne qu’elle n’est pas seule dans sa souffrance. Elle exprime une présence et un soutien inconditionnels.
- Comment le dire : Avec un ton calme et sincère, en étant physiquement présent ou par un message bienveillant.
- « Ça doit être vraiment difficile, veux-tu en parler ? »
- Pourquoi c’est important : Reconnaître la difficulté de la situation valide les sentiments de la personne. Cela ouvre la porte à une communication honnête et profonde.
- Comment le dire : Avec empathie et patience, en écoutant activement les réponses sans interruption ni jugement.
- « Tes sentiments sont légitimes et compréhensibles. »
- Pourquoi c’est important : Cela aide à normaliser les émotions de la personne, lui permettant de se sentir validée et comprise.
- Comment le dire : De manière authentique, en montrant de la compréhension et de l’acceptation des émotions exprimées.
- « Je comprends que cela puisse être très douloureux. »
- Pourquoi c’est important : Montrer de la compréhension et de l’empathie aide à renforcer le lien de confiance et de soutien.
- Comment le dire : Avec douceur, en reflétant les sentiments de la personne et en lui offrant une écoute active.
- « Je suis désolé que tu traverses cela. »
- Pourquoi c’est important : Exprimer des regrets pour la souffrance de l’autre montre de la compassion et une volonté d’être présent pour elle.
- Comment le dire : Avec sincérité et sans chercher à minimiser les émotions de la personne.
Ce « qu’il ne faut pas dire »
- « Ça ira mieux demain, ne t’inquiète pas. »
- Pourquoi c’est problématique : Minimiser les sentiments actuels de la personne peut la faire se sentir incomprise et isolée.
- Alternative : « Je sais que c’est difficile maintenant, mais je suis ici pour toi chaque jour. »
- « Tu dramatises trop. »
- Pourquoi c’est problématique : Cela invalide les émotions de la personne et peut créer une barrière de communication.
- Alternative : « Tes sentiments sont importants, parlons de ce que tu ressens. »
- « Il y a pire dans la vie. »
- Pourquoi c’est problématique : Comparer les souffrances peut diminuer l’importance des émotions de la personne.
- Alternative : « Je suis désolé que tu te sentes ainsi, je suis là pour t’écouter. »
- « Tu devrais te ressaisir. »
- Pourquoi c’est problématique : Cela suggère que la personne peut facilement contrôler ses émotions, ce qui n’est souvent pas le cas.
- Alternative : « Je sais que c’est dur, comment puis-je t’aider à traverser cela ? »
- « Ne pleure pas, ça ne sert à rien. »
- Pourquoi c’est problématique : Empêcher quelqu’un d’exprimer ses émotions peut aggraver son sentiment de détresse.
- Alternative : « C’est normal de pleurer, laisse sortir tes émotions, je suis là pour toi. »
En évitant les phrases qui minimisent ou invalident les sentiments et en optant pour des expressions de soutien, de compréhension et de présence, nous apportons un réconfort véritable et aidons la personne à se sentir moins seule dans sa douleur.
Nos propres mécanismes d’adaptation
Reconnaître ses propres biais
Nos propres mécanismes d’adaptation interfère avec notre capacité à apporter un soutien adéquat. Les reconnaître est la première étape pour améliorer notre écoute et notre présence.
- Identifier ses réactions automatiques
- Parfois, nous utilisons des mécanismes d’adaptation sans même nous en rendre compte. Par exemple, nous rationalisons la souffrance d’un proche pour nous sentir moins impuissants ou pour éviter notre propre inconfort.
- Exemple : Si, face à la détresse de quelqu’un, vous répondez instinctivement par une solution logique sans écouter pleinement ses émotions, c’est une rationalisation.
- Observer l’impact sur la communication
- Nos mécanismes d’adaptation affecte la qualité de notre communication. Par exemple, l’évitement ou le déni revient à ne pas aborder des sujets préoccupants, laissant le proche se sentir isolé.
- Exemple : Si vous changez constamment de sujet quand un proche essaie de parler de ses problèmes, c’est un signe d’évitement.
Travailler sur soi-même
Soutenir efficacement un proche en souffrance, demande de travailler sur nos propres réactions et d’apprendre à écouter sans jugement.
- Apprendre à écouter activement
- L’écoute active implique de vraiment entendre ce que l’autre dit, sans préparer mentalement sa réponse pendant qu’il parle. Cela inclut des techniques comme reformuler ses propos pour vérifier la compréhension et poser des questions ouvertes pour encourager l’expression.
- Exemple : « Je comprends que tu te sens très stressé par cette situation, peux-tu m’en dire plus sur ce qui te préoccupe le plus ? »
- Appliquer techniques de communication empathique
- La communication empathique consiste à reconnaître et à valider les émotions de l’autre. Cela demande de la patience, mais c’est primordial pour offrir un soutien bienveillant.
- Exemple : « Je peux voir que tu es vraiment triste, et c’est normal après ce que tu as vécu. »
Pratiquer l’auto-compassion
L’auto-compassion permet d’être indulgents envers nous-mêmes, ce qui nous aide à mieux soutenir les autres.
- Accepter ses propres limites
- Il est important de reconnaître que nous ne pouvons pas toujours avoir les bonnes réponses immédiatement. L’auto-compassion implique de se pardonner pour ses propres imperfections et d’accepter que le soutien n’est pas toujours parfait.
- Exemple : « Je ne sais pas toujours quoi dire, mais je suis ici pour toi et j’apprends avec toi. »
- Prendre soin de soi pour mieux prendre soin des autres
- Pour être un bon soutien, il faut aussi prendre soin de sa propre santé mentale et émotionnelle. Cela inclus des pratiques de relaxation, des activités qui nous ressourcent et du temps pour soi.
- Exemple : Prendre des moments de pause réguliers pour pratiquer la méditation ou une autre activité apaisante.
- Comprendre que chaque situation est unique
- Chaque personne et chaque situation sont différentes. Il est important de ne pas appliquer une solution universelle mais de rester adaptable et attentif aux besoins spécifiques du proche.
- Exemple : Plutôt que de donner des conseils génériques, poser des questions pour comprendre les besoins uniques de la personne, comme « Qu’est-ce qui pourrait t’aider en ce moment ? »
En reconnaissant nos propres mécanismes d’adaptation, en travaillant sur notre écoute et notre communication, et en pratiquant l’auto-compassion, nous garantissons un soutien plus authentique et efficace à un proche en souffrance. Cela demande du temps et de la patience, mais les résultats en valent la peine, tant pour nous-mêmes que pour ceux que nous voulons aider.
Conclusion
Soutenir un proche en souffrance est une tâche délicate qui nécessite patience, écoute et empathie. En comprenant nos propres mécanismes d’adaptation et en travaillant à les surmonter, nous donnons un soutien plus bienveillant. Écouter activement, valider les émotions de l’autre et pratiquer l’auto-compassion sont des étapes pour apporter un soutien véritable.
Chères lectrices, je vous encourage à réfléchir à vos propres mécanismes d’adaptation et à travailler activement à les reconnaître et les ajuster. Prenez le temps d’écouter vos proches avec empathie et sans jugement.
N’hésitez pas à partager vos expériences et vos conseils dans les commentaires ci-dessous.